Mercredi 11 septembre, les syndicats et les professionnels de l’enfance étaient en grève pour faire obstacle au projet de Code de la justice, présenté le jour même en Conseil des ministres. Ce nouveau texte devrait se substituer à l’ordonnance du 2 février 1945, relative à la délinquance des mineurs.
« Mise à l’épreuve »
Le nouveau projet inquiète, surtout, car la dimension éducative ne servirait plus à éduquer et à reconstruire les jeunes, mais plutôt à les mettre à l’épreuve. Selon l’Unicef, la dimension éducative serait en fait réduite « à une forme de sursis probatoire, assorti de multiples interdictions et obligations ».
« Désormais, c’est le juge qui va décider du temps qu’il nous faut pour gagner la confiance d’un jeune qui a commis une faute, lui faire prendre conscience de son acte, et pour reprendre pied dans le monde des adultes », explique Pierre Lecorcher, éducateur à Aubervilliers et représentant syndical CGT, qui estime, lui, qu’« avoir un temps éducatif déterminé à l’avance, avant le jugement de l’enfant, risque d’empêcher sa reconstruction ».
« La ministre argue qu’il faut réduire les délais et juger plus rapidement les mineurs. Mais nos gamins ne sont pas des boîtes de conserve ! Ce sont des êtres humains à reconstruire ! » tonne Vito Fortunato, éducateur et co-secrétaire national du SNPES-PJJ/FSU. « Nous devons aider ces jeunes à trouver leur place dans la société », rappelle l’éducateur.
Manque de moyens
Alors que la justice manque cruellement de moyens, un budget important vient d’être débloqué pour la construction de vingt nouveaux centres éducatifs fermés, qui s’ajouteront aux cinquante-deux déjà existant. Or, « ces dispositifs coûtent entre 650 et 800 euros par jour et par enfant contre 100 euros pour un suivi en milieu ouvert. De plus, ils sont inefficaces et liberticides », fulmine Pierre Lecorcher.
Pour les professionnels de la jeunesse, toutes ces mesures, coûteuses et inefficaces, s’inscrivent en fait dans un processus de stigmatisation de la jeunesse. « Depuis plus de trois ans, le nombre d’enfants placés en détention explose, avec 845 mineurs détenus en prison, dont près de 84 % en détention provisoire, alors que la délinquance des mineurs ne progresse pas », estime l’un d’entre eux.