Ihumātao : Une ZAD en Nouvelle-Zélande

Le territoire de Ihumātao est actuellement occupé par des «défenseurs » afin d’empêcher la construction d’appartements sur une terre maori historique

Un groupe pacifiste est à l’origine de l’occupation ; SOUL (Save Our Unique Landscape) signifiant « sauver notre paysage unique ». Le début de l’occupation à proximité d’Auckland remonte à trois ans. Au fil du temps les défenseurs ont obtenu du soutien du reste du pays et de l’étranger. De nombreuses personnes viennent visiter les lieux et soutenir leur cause. Ihumātao se trouve à proximité de la Réserve Historique des champs de pierre d’Ōtuataua à Māngere. Ce site est considéré comme wahi tapu ; sacré, en maori.

Ihumātao et la rupture du Traité de Waitangi

En 2014 le conseil municipal d’Auckland a ratifié la transformation de ces 32 hectares en zone de développement destinée à accueillir des logements. Peu après en 2015, Pania Newton, la leader de SOUL a commencé à protester en raison de l’importance historique de Ihumātao. Il faut ajouter que ces terres ont historiquement été volées, par décret, aux tribus maori en 1863. Cette expulsion et la déportation des tribus locales a causé de nombreuses violences et des morts. Par ailleurs cette expulsion est une rupture du Traité de Waitangi entre la couronne et les tribus maoris.

De nombreuses manifestations ont eu lieu ainsi que de nombreux hui (réunion). Les défenseurs ont construit un whare, une maison traditionnelle maori, et érigé un Pouwhenua, une sorte de totem marquant la limites des terres. Le 5 novembre 2016 une vingtaine de membres de la communauté ont commencé à camper à Ihumātao. La même année, le terrain a été vendu à Fletcher Residential. L’entreprise a pour projet de construire 480 maisons.

Occupations et recours juridiques

SOUL critique en premier lieu la façon dont Fletcher s’est rendu propriétaire des lieux. Après la saisie des terres en 1863 la couronne en est devenu propriétaire en 1867. Par la suite les lieux ont été vendus à des Pakehas, les colons blancs. Le terrain est alors resté une terre agricole pendant 150 ans. En 2017 les défenseurs ont porté leur lutte jusqu’aux Nations-Unies dans l’espoir de faire reconnaître le non respect du Traité de Waitangi selon la Déclaration des Droits des Peuples Indigènes. L’ONU a reconnu que la consultation et le consentement des populations maori n’avait pas été correctement recherché.

Le problème a ensuite été traité par le Tribunal de l’environnement. Ce dernier a refusé de revenir sur la décision d’accorder le permis de construction à Fletcher. Les défenseurs ont alors apporté une pétition au parlement à Wellington, demandant l’intervention du gouvernement. Des demandes répétées ont également été faites au conseil municipal d’Auckland. Le problème c’est qu’au sein même des tribus maoris la question ne fait pas l’unanimité.

Une lutte interne chez les maoris

Au début de cette année, soutenu par des membres respectés des tribus maoris, la police est venu expulser les défenseurs. Cependant la manœuvre n’a pas fonctionné et des membres de SOUL ont lancé des appels à réoccuper la terre. De nombreuses personnes sont venus leur apporter leur soutien. Quelques arrestations ont eu lieu après que des personnes aient empêché l’arrivée de camions. Aujourd’hui les choses sont toujours dans l’impasse. Les défenseurs sont toujours sur les lieux et leur demandes sont de plus en plus populaires dans la population.

Ihumātao a révélé une rupture générationnelle et même une lutte de classe interne aux iwis (tribus) maoris. Les maoris ayant été consulté au sujet de la cession de ces terres ne sont pas les personnes de la tribu locale. Pour l’instant l’occupation tiens bon et les défenseurs ont promis de faire tout leur possible pour protéger cette terre.