Bien que le procédé ait ses partisans, ses détracteurs sont aussi, voir plus nombreux. En cause, l’augmentation de la charge de travail, des conditions dégradées, et l’absence de contact avec les collègues.
« Plus difficile de poser des limites »
« Je n’ai pas eu accès au matériel pour travailler convenablement au début, mais ma hiérarchie me mettait quand même la pression pour faire avancer le travail, explique Céline, ingénieure en Île-de-France. On nous demandait sans cesse de justifier les retards dans nos avancements de projet dans des tableaux ».
« Quand on travaille de chez soi, c’est plus difficile de poser des limites à son investissement, et je me suis souvent retrouvée à lire mes mails le soir », constate, très justement, l’ingénieure.
Forme d’ubérisation
« On ne peut pas se satisfaire de la façon dont cela fonctionne, ce n’est pas du télétravail, c’est du travail à domicile dégradé », assure François Hommeril, président de la CFE-CGC, selon qui ce procédé est le meilleur moyen d’« ubériser » les salariés.
« Un certain nombre d’employeurs en ont profité pour sortir complètement de leurs obligations fondamentales vis-à-vis de leurs salariés. Sans horaires de travail définis et sans droit à la déconnexion effectif, certains patrons ont imposé à leurs salariés un lien de subordination permanent, en oubliant très souvent de prendre en charge les frais d’équipement », regrette Sophie Binet, cosecrétaire générale de l’Ugict-CGT.
Moins de relations humaines
« Travailler de chez soi à temps plein, sauf urgence sanitaire, c’est une grosse ligne rouge pour nous. C’est la meilleure des manières pour casser le collectif de travail et isoler socialement les salariés », assure Sophie Binet.
« Parfois, c’était silence radio de la part de ma chef, je bossais toute seule, je n’avais aucun contact. Il y a eu plusieurs moments où je me suis sentie inutile, je n’arrivais plus à me lever le matin. J’ai perdu toute envie de travailler, ça a été très dur mentalement », témoigne Léane, jeune journaliste ayant souffert de l’isolement.