USA, avortement
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L’abrogation du droit à l’avortement, entérinée par la Cour Suprême vendredi 24 juin dans son arrêt Dobbs vs Jackson Women’s Health Organization, a d’ores et déjà des conséquences dramatiques. 

La plus outrageuse d’entre elles est sans doute le cas de cette fillette de dix ans victime d’un viol, qui s’est vu refuser le droit d’avorter dans l’Etat de l’Ohio et a due voyager dans l’Indiana pour subir l’intervention. 

Médecins en sursis

Selon les deux journalistes de l’Indianapolis Star ayant révélé l’affaire au grand jour, le médecin responsable de la fillette dans l’Ohio, un spécialiste des maltraitances aux enfants, aurait contacté une gynécologue de l’Indiana, le Dr. Caitlin Bernard, pour qu’elle s’occupe de sa patiente.   

La gynécologue a bien sûr immédiatement accepté de voir la fillette, regrettant qu’elle soit peut-être parmi les dernières à pouvoir bénéficier de son aide. « Il est difficile d’imaginer que dans quelques semaines seulement, nous ne serons pas en mesure de fournir ces soins », s’inquiète le Dr Bernard.

« Opportunité »

La nouvelle a rapidement suscité l’indignation de plusieurs personnalités politiques. « Une victime d’abus sexuels âgée de 10 ans se voit refuser l’avortement en Ohio, car elle était enceinte de six semaines et trois jours. C’est fou. Elle a dix ans », a déclaré le procureur général de la Caroline du Nord, le démocrate Josh Stein.

« Une fille de 10 ans est violée. L’État l’oblige à rester enceinte et lui dit de considérer cela comme une ‘opportunité’. Ce n’est pas l’Iran. Ce n’est pas Gilead (Etat fictif de la série The Handmaid’s tale). Ce n’est pas hypothétique. C’est arrivé aujourd’hui dans l’Ohio », s’indigne pour sa part Gavi Begtrup, un élu démocrate de l’Ohio, faisant ici référence aux propos tenus par l’élue conservatrice Jean Schmidt en avril dernier. « C’est dommage que cela se produise, mais il y a une opportunité pour cette femme, peu importe qu’elle soit jeune ou âgée, de décider de ce qu’elle va faire pour aider cette vie à être un être humain productif », avait-elle déclaré. 

Avortement, Etats-Unis
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Vendredi 24 juin, la Cour suprême américaine a décidé d’abroger le droit constitutionnel à l’avortement protégé par l’arrêt Roe v. Wade depuis 1973. Désormais, chaque Etat pourra décider s’il autorise ou non l’avortement. 

Joie des conservateurs

Pour le porte-parole de la Cour suprême, le juge Samuel Alito, « la Constitution ne fait aucune référence à l’avortement et aucun de ses articles ne protège implicitement ce droit ». L’arrêt Roe v. Wade est «  totalement infondé et doit être annulé  », clamait-il ces dernières semaines. C’est désormais chose faite, pour le plus grand plaisir des conservateurs. « Il est temps de rendre la question de l’avortement aux représentants élus du peuple », se réjouit Samuel Alito. 

Le chef des Républicains au Sénat, Mitch McConnell, a loué une « victoire historique pour les plus vulnérables de notre société », tandis que l’ancien vice-président, Mike Pence, va plus loin, demandant la nationalisation de l’interdiction. La « sainteté de la vie doit être rétablie au cœur du droit américain dans tous les États », réclame-t-il. 

Femmes en danger

« La santé et la vie des femmes de ce pays sont maintenant en danger », a immédiatement réagi le président Joe Biden, promettant d’aider celles qui voudront changer d’Etat pour se faire avorter.

Nous éprouvons « une grande tristesse pour la Cour et surtout pour les millions de femmes qui ont aujourd’hui perdu une protection constitutionnelle fondamentale », ont de leur côté fait savoir les trois juges progressistes de la Cour suprême.

Selon l’historienne Jennifer Holland, la situation va vite devenir très compliqués pour les femmes, à un point que les pro-life n’imaginent pas. « Ce monde qu’ils créent va-t-il ressembler à ce qu’ils avaient promis ? Les électeurs accepteront-ils de voir des gens jetés en prison pour une procédure médicale qui était légale hier ? Les femmes se porteront-elles mieux car elles ne seront pas traumatisées par l’avortement, comme le répètent ces activistes depuis 40 ans ? Je ne pense pas », prévient-elle.

avortement, usa
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Alors que la Cour suprême est censée se prononcer en juin 2022 sur la constitutionnalité d’une loi votée par le Mississippi et allant à l’encontre du célèbre arrêt de 1973 Roe v. Wade, l’issue du vote ne laisse que peu de place au doute. 

«  La décision au peuple  »

Le parlement local du Mississippi a récemment voté une loi interdisant la pratique de l’avortement au-delà de quinze semaines de grossesse, contrairement à Roe v. Wade qui l’autorise jusqu’à 22 semaines au niveau fédéral. 

Scott Stewart, l’un des représentants républicains du Mississippi ayant porté le texte, estime que Roe v. Wade devrait être invalidé car il n’a «  pas de fondement dans la Constitution ». Toutes les décisions relatives à l’avortement ont « maintenu la Cour pendant cinquante ans au cœur d’une bataille politique », estime-t-il, demandant que la décision soit rendue au peuple.

Avantage aux «  pro-life  »

Au sein de la Cour suprême, six juges sont réputés conservateurs tandis que trois sont vus comme progressistes. Or, parmi les six juges conservateurs, quatre ont d’ores et déjà publiquement dévoilé leurs aspirations «  pro-life  ». « Une interdiction après quinze semaines ne me semble pas un changement énorme par rapport à la viabilité, c’est la règle adoptée par une majorité de pays », a par exemple laissé entendre le président de la Cour suprême, John Roberts.

« La Cour a été obligée de choisir un camp dans l’un des débats de société les plus clivants en Amérique », alors qu’elle devrait «  être scrupuleusement neutre  », a de son côté déclaré Brett Kavanaugh, sous-entendant qu’il laisserait le dernier mot aux élus. 

La juge Amy Coney Barrett a, elle, été on ne peut plus claire sur ses intentions de vote, déclarant qu’il y avait assez de centres pour accueillir les enfants non désirés. Tout comme le juge Clarence Thomas, connu comme étant le plus conservateur de la cour, qui s’est prononcé par l’interrogative : « Quel droit constitutionnel protège le droit à l’avortement ? », a-t-il simplement déclaré. 

avortement, usa
Coup de gueuleSociété

Le 24  janvier dernier, Donald Trump est devenu le premier président de l’histoire des États-Unis à participer à la « Marche pour la vie », ce rassemblement annuel organisé par les anti-IVG depuis 1974. 

« Contre-révolution féministe »

«   L’enfant à naître n’a jamais eu plus grand défenseur à la Maison-Blanche !   » a clamé Donald Trump à l’occasion de l’événement, faisant des allusions répétées à l’enfant qui grandit, à l’amour et à Dieu, et listant toutes les mesures qu’il avait prises contre l’IVG depuis le début de son mandat.

Un discours fanatique devant une foule en délire, que la sociologue Marie-Cécile Naves inscrit dans un mouvement plus vaste, observable à l’échelle mondiale, qu’elle qualifie de « contre-révolution féministe ». « Dans certains pays, il y a une tentation très forte de réduire l’accès à l’avortement et les droits des femmes en général, explique madame Naves, par ailleurs directrice de l’Observatoire genre et géopolitique de l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).  Cela relève d’un projet identitaire de consolidation des valeurs chrétiennes, et d’un mythe selon lequel restreindre l’avortement permettrait de limiter l’immigration, les femmes blanches faisant plus d’enfants. »

Mais en réalité, « on s’en prend aux droits des femmes quand on veut maintenir un système en place, des privilèges et un pouvoir masculin », fulmine la sociologue.

Juges suprêmes anti-IVG

Légal au Etats-unis depuis 1973 (et l’arrêt de la Cour suprême Roe versus Wade), l’avortement subit les attaques incessantes des protestants évangéliques et des ultra-catholiques, qui constituent, en outre, le socle de l’électorat de Donald Trump. Des attaques qui ont fini par porter leurs fruits, 17 Etats fédérés ayant pris des mesures anti-avortement en 2019 : parmi eux l’Alabama, qui interdit désormais l’avortement même en cas de viol, et condamne les médecins qui enfreindraient la loi à 99 ans de prison. 

Mais Donald Trump veut aller encore plus loin, en amenant la procédure jusque devant la Cour suprême, pour obtenir l’annulation de l’arrêt Roe versus Wade. Le président américain a, pour cela, nommé deux juges notoirement anti-IVG à la Cour suprême, qui devrait rendre un avis concernant l’avortement en Louisiane, en juin.

 

Coup de gueule

La journaliste Hajar Raissouni porte plainte pour torture suite à son arrestation pour « avortement illégal » et « relations sexuelles hors mariage ».

Le 31 août dernier la journaliste marocaine de Akhbar Al Yaoum est arrêtée par la police dans un cabinet gynécologique de Rabat. Elle est en compagnie de son fiancé et présente une hémorragie. Malgré la présence du personnel médical la police décide de l’arrêter pour un flagrant délit « d’avortement illégal » et « relations sexuelles hors mariage ».

En plus des protestations et de la réfutation des accusations Hajar Rassouni porte aujourd’hui plainte pour torture. La police l’aurait en effet forcé à un examen médical lors de son interrogatoire ; « une violation de son intégrité physique et morale » selon les propos de son avocat Mohammed Sakdou. Cette procédure aurait été effectuée afin de forcer les aveux de la journaliste ; d’où l’accusation de torture.

Ciblée pour son rôle de journaliste ?

L’enjeu est évidemment l’interdiction de l’avortement par le Maroc. Par ailleurs le gynécologue présent nie toute tentative d’avortement. Le médecin a fait son travail pour aider une personne en situation d’urgence ; chose que permet la loi marocaine.

Selon le gynécologue Chafik Chraibi, président de l’association marocaine contre l’avortement clandestin, ces affaires ont des effets dramatique. Désormais beaucoup de médecins refusent de pratiquer un avortement, même dans un cadre légal. Enfin cette criminalisation a outrance a pour effet d’augmenter le nombre d’avortements clandestins avec les effets que l’on connaît.

Il faut ajouter que certains pensent que cette attaque contre Hajar Raissouni n’est pas un hasard. Cette journaliste serait connue pour oser traiter de « sujets qui fâchent » selon son oncle.

Politique

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C’est au site du Vatican à Reuteurs que le Pape François a reçu le président Barak Obama jeudi matin. Quelques sujets comme les droits des homosexuels et l’avortement ont été mis de côté. Le sujet de conversation s’est surtout centré dans la lutte contre la pauvreté dans le monde.

L’entretien privé entre le président et pape a duré une cinquantaine de minutes environ. Après ce tête-à-tête, le président américain déclare dans une interview que l’autorité morale considérable dont le pape possède pourrait avoir une grande influence positive pour le rééquilibrage social et économique dans le monde. Toujours d’après lui, l’écart qui est visible actuellement entre les revenus des plus riches et des Américains moyens n’est pas uniquement un problème économique. Le souci est aussi d’ordre moral. Évidemment, ce problème ne se limite seulement pas aux frontières américaines, c’est aussi l’une des sources de la pauvreté dans le monde.

Pour sa visite au Vatican, Barak Obama a été accompagné d’une délégation et parmi elles le secrétaire d’État John Kerry.