Coup de coeurInternational

Le début de l’année scolaire a commencé par un retour du mouvement lycéens avec blocages et manifestations contre l’inégalité dans l’éducation

Ce retour du mouvement lycéen, de concert avec la marche féministe massive du 8 mars semble avoir redynamisé la mobilisation. De nombreuses actions de protestations, des manifestations ont eu lieu dès le premier jour des cours. Au lieu de retourner en classe les lycéens sont dans la rue. Le mouvement semblait s’être calmé pendant l’été chilien. La colère de la population ne semble pourtant pas s’être calmée. De plus le référendum sur le changement de la constitution héritée de Pinochet se tiendra en avril.

Le retour des manifestations

Selon Myaray Jimenez, le porte-parole de la Coordination des étudiants du secondaire d’Antofagasta ; « Il y a beaucoup de colère et de mécontentement. Pour ceux d’entre nous qui étudient dans les lycées municipaux, l’éducation qu’on nous donne est accablante ». L’éducation est depuis le début une des questions principales pour le mouvement social avec les retraites et le système de santé. La différence de qualité entre l’éducation reçu en lycée privé et le lycée public est un grave problème. Il faut aussi ajouter à cela la question des dettes des étudiants de l’université.

Rappelons que ce sont les lycéens qui ont lancé ce mouvement qui a débuté en octobre. Suite à cela la répression a été extrêmement dure ; des milliers d’arrestations et de blessés. Près de 30 personnes sont mortes dans des affaires liées à la répression. Les policiers continuent d’ailleurs à utiliser les munitions qui ont éborgné ou gravement blessé les yeux de 445 personnes. Selon un sondage récent deux tiers des chiliens soutiennent le retour du mouvement. Le pourcentage d’approbation du président du pays est à 12 %. Des réformes ont été lancées, mais les opposants veulent le renversement complet de ce système injuste. Le président a menacé qu’il n’hésiterait pas à instaurer un nouvel état d’urgence ; ceci ne risque pas de calmer les manifestants.

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En trois jours de mobilisation la police a abattu une quatrième personne ce qui a relancé le mouvement de contestation

La dernière personne a avoir été tuée est un étudiant de 24 ans. Le jeune homme était un supporter du club de foot Colo Colo. Il a été renversé par un camion de police lors d’affrontements avec des agents de sécurité à proximité du stade de l’équipe de Santiago. Il est mort de ses blessures deux jours plus. La police a en effet pour habitude de traverser la foule à grande vitesse avec ses véhicules en dispersant des lacrymogènes. Ce n’est pas la première fois que cette méthode a de s conséquences dramatiques. La mort de ces personnes semble avoir revitalisé le mouvement d’opposition au gouvernement.

Violences et mort dans le mouvement

La mobilisation semblait pourtant se calmer. Les manifestations ne se tenaient plus que les vendredis à Santiago. Les affrontements avec la police avaient aussi baissé en intensité. Ce ne sont pourtant pas les premiers morts du mouvement. Malgré tout la proximité de ces décès choque de nombreuses personnes. La police est dénoncée de tous côtés, et même à l’international, pour sa gestion du maintien de l’ordre. Les accusations de violences, viols et tortures sont monnaies courantes.

Au total 31 personnes sont mortes au sein de la mobilisation entre le 18 octobre 2019 et le 28 janvier 2020. Le parquet chilien reconnaît seulement que quatre ont été tués au cours d’une intervention policière et deux en détention. En effet de nombreuses personnes ont été retrouvées mortes dans des conditions douteuses, ou après le passage de la police sans que des preuves directes de l’implication des agents aient été trouvées. De leurs côtés le Haut-commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme, Amnesty International et Humans Right Watch ont dénoncé le comportement des forces de police aux ordres du président Piñera .

Coup de gueuleInternational

Les canons à eau utilisés dans la répression du mouvement social contiendraient de la soude caustique en plus de produits lacrymogènes

Le Mouvement de Résistance de la Santé affirme que l’eau des canons à eau contient de la soude caustique. Le MRS est une organisation regroupent 400 étudiants et professionnels de la santé et participants au manifestations. Le MRS explique que des prélèvements ont été analysés après que de nombreux manifestants se soient plaints de brûlures. Suite à la publication du rapport le directeur général de la police s’est fendu d’un communiqué. Selon lui la composition du liquide « respecte les standards internationaux », ce qui n’a rien de rassurant.

Le Chili n’en a pas fini avec la répression

Le rapport du MRS publié le 16 décembre dernier précise bien que l’eau utilisé par les Carabiniers du Chili pour réprimer les manifestants est loin d’être seulement de l’eau. Selon le rapport le liquide contient des produits extrêmement irritants, notamment de la capsaïcine ; le composant principal des bombes lacrymogènes. L’autre élément majeur est la soude caustique ; « un produit extrêmement corrosif lorsque utilisé en contact direct, et hors de toute normes légales dans son utilisation anti-émeute » selon le MRS.

Les canons à eau sont surnommés « guanacos », une sous-espèce de lama qui crache lorsqu’il se sent menacé. A n’en pas douter la substance utilisé par la police n’a rien d’aussi anodin ; la concentration de la capsaïcine et de la soude caustique est si forte qu’ils représentent les additifs principaux de cette « eau ». Le pH de cette « eau » est à 12 sur une échelle de 1 à 14. Ceci signifie que ce produit est ; « potentiellement létal et capable de causer de graves dégâts sur la peau, en contact avec les yeux ou par ingestion accidentelle ».

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Au moins 23 personnes ont été tuées par la police chilienne, 200 ont perdus au moins un œil et plus de 2300 ont été blessées

La France, qui est pourtant coutumière du soutien apporté aux régimes autoritaires et répressifs a cette fois refusé d’aider le Chili. Face à l’indignation le gouvernement a choisi d’annuler la formation que la police française devait fournir aux forces de police chiliennes en terme de maintien de l’ordre. Le président chilien Sebastian Piñera avait récemment déclaré que les polices anglaises françaises et espagnoles allaient conseiller les forces chiliennes sur le maintien de l’ordre.

Une internationale de la répression

Ce partage d’expérience visait clairement à améliorer l’efficacité de la police chilienne dans la répression. Le sous-secrétaire au ministère de l’Intérieur chilien, Rodrigo Ubilla parlait ainsi des ; « situations de conflits intenses et de violences telles qu’elles ont été observées ces derniers jours ». Ceci est sans aucun doute très gênant pour la diplomatie française qui se serait certainement passé de ces commentaires. Étant donné la virulence de la répression dans le contexte français, le rapprochement avec Piñera est plus que gênant. Le nombre de personnes ayant perdu la vue au Chili rappelle la critique des LBD en France dont les policiers se servent pour éborgner les manifestants.

L’ONG Humans Rights Watch a dénoncé de graves violations des droits de l’homme de la part de la police. Le directeur de l’ONG pour les Amériques, Jose Miguel Vivanco déclare avoir reçu des centaines de plaintes, dénonçant la violence abusive. Les manifestants de leur côté parlent de tortures, de viols, de meurtres et de disparitions. Pour beaucoup ces évènement couplés avec les mensonges des médias et du pouvoir rappellent les heures de la dictature. Personne n’est à l’abri ; l’universitaire Gustavo Gatica a par exemple perdu la vue le 8 novembre suite à des tirs de la police. Il est le premier à être devenu entièrement aveugle du fait de la violence policière. Son cas est devenu symbolique. La police s’est engagée à arrêter d’utiliser ces projectiles mais la croix rouge chilienne rapporte qu’ils soignent encore des gens blessés par ces armes.

On ne fait pas taire la colère par la violence

Dernièrement la répression s’est abattu encore plus lourdement sur la ville d’Antofagasta, au nord du pays. Le comite d’urgence et de protection de cette ville minière a dénoncé un saut dans la violence policière. Le comité rapport que des enfants ont été blessés par des tirs de chevrotine et trois personnes ont été blessées par balle. De plus la police militaire est rentrée de force dans des habitations. Pour certains cette répression violente sur la ville d’Antofagasta vient du fait que la ville est particulièrement mobilisée et combative.

Le 15 novembre dernier le gouvernement et l’opposition ont signé un accord historique pour réécrire la constitution. Ce document est pour l’instant un héritage direct de la dictature. Il semble cependant que cela ne suffise pas à calmer la colère populaire. Comme à Hong-Kong et ailleurs, le gouvernement lâche du lest trop peu et trop tard ; la répression est venue à s’ajouter aux raisons de la colère. De plus la question de la constitution n’englobe pas toute les revendications. Les manifestants exigent une augmentation du salaire minimum et un meilleur accès à l’éducation, à la santé et au logement. L’annonce des élections n’a heureusement pas entamée leur combativité.

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Le parlement a réussi à se mettre d’accord sur la convocation d’un référendum visant à introduire des changements constitutionnels

Ce référendum va se tenir en avril 2020. Le but est clairement d’apaiser le climat quasi-insurrectionnel qui règne dans le pays depuis près de deux mois. Il s’agit d’un accord historique ; le gouvernement et l’opposition ont accepté de mettre sur la table la réécriture de la constitution. Ceci était une exigence de longue date de la rue et du mouvement social. La constitution est directement héritée de la dictature de Pinochet.

Le référendum comptera deux questions ; une sur la révision de la constitution et l’autre sur la méthode pour la rédiger. En effet pour beaucoup de personnes, faire réécrire la constitution par ceux qui sont au pouvoir ne risque pas de faire changer grand-chose. Plusieurs méthodes et idées sont actuellement étudiées, notamment l’élection des rédacteurs du texte.

Pour que tout reste comme avant il faut que tout change

Il est clair que la classe politique chilienne se sent menacée, la gauche comme la droite. Ces derniers ne sont pas en phase avec le mouvement populaire qui les dépasse largement. Ceci est très clairement une façon de tenter de ramener le calme. En faisant mine de répondre aux demandes et en fixant une date prochaine, on peut espère vider les rues et diviser le mouvement. Cependant les gens ne manifestent pas uniquement pour un changement constitutionnel ; le cœur de la mobilisation repose sur la question des injustices économiques.

On voit bien l’hypocrisie des partis de gouvernement de Hong-Kong à Paris ; on cède sur une partie des demandes pour éviter d’avoir à accepter les autres. C’est un miroir aux alouettes qui est présenté à la population. La lutte contre les injustices économiques ne sera pas entérinée par une constitution aussi progressiste soit-elle, surtout si elle est rédigée par la même classe politique qui a profité de cette constitution héritée de la dictature.

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Le président a annoncé la mise en place de l’état d’urgence dans l’espoir de faire taire le mouvement social qui enflamme le pays

Le mouvement a débuté autour de la question de l’augmentation des prix des transports en commun. De nombreuses actions directes ont été menées, notamment par les étudiants qui sont à l’avant-garde de la contestation. Des attaques ont été menées contre des stations de métro, des bâtiments et les forces de l’ordre. Les manifestations ont également été la cible d’une violente répression policière.

L’État d’urgence est une mesure mise en place sous la dictature de Pinochet, ce qui fait craindre le pire à d’importants secteurs de la population. Les forces armées et notamment des véhicules blindées patrouillent actuellement les rues de la capitale. Cette présence menaçante ne s’était pas vue depuis le tremblement de terre de 2010.

Cette mesure d’exception peut en théorie durer 15 jours. L’état d’urgence permet notamment de restreindre la liberté de circulation et de réunion. Des mesures permettant de condamner les contrevenants à près de 20 ans de prison sont aussi prévues. Le président Sebastián Piñera a annoncé la mesure dans un discours télévisé ; « Il n’y a pas de place pour la violence dans un pays ayant comme principe le respect de l’état de droit ».

L’étincelle met le feu au pays

Pour l’instant la mesure ne semble pas avoir dissuadé les manifestants. Vendredi dernier des affrontements ont encore eu lieu avec les forces de l’ordre. Les policiers ont tenté sans succès d’empêcher les manifestants de mettre le feu au siège social de Enel. L’entreprise énergétique italienne ayant eu la mauvaise idée d’augmenter ses prix de 10 % dernièrement.

De nombreux rapports font état d’une grande violence de la police vis à vis des étudiants et lycéens qui sont au cœur du mouvement. On possède malheureusement encore peu de nouvelles à ce sujet. Ce mouvement dépasse pourtant largement des questions estudiantines. Les problèmes de coûts de la vie sont la raison principale de cet important mouvement populaire. Les manifestants soulèvent des problèmes liés au services publics de façon générale et tout spécialement la Santé et l’Éducation. La colère est actuellement également en train de se tourner vers les carabineros, la police nationale chilienne, dont la brutalité a choqué de nombreuses personnes. Les étudiants appellent également à une grève générale pour lundi prochain ; le mouvement n’en est qu’à ses débuts.

Coup de gueule

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C’est une triste annonce qu’a faite, jeudi 15 août, Rafael Correa, le président équatorien. Face au refus d’une aide internationale, il a demandé au Congrès d’autoriser l’exploitation des réserves pétrolières du parc Yasuni, un des parcs nationaux les plus riches de toute l’Amazonie.

Fortement sollicité par les compagnies pétrolières désireuses d’exploiter les quelques 850 millions de barils de brut enfouis dans la biodiversité du parc national Yasuni, le président de l’Equateur appelle, en 2007, la communauté internationale à l’aide.

En échange de l’abandon du projet, M. Correa demande une aide financière de 3,6 milliards d’euros sur 12 ans, compensant en partie le manque à gagner pour la non-exploitation de ce bloc de forêt tropicale et l’engagement de son pays contre le réchauffement climatique.

Malheureusement, en 5 ans, la communauté internationale n’a réussi à réunir que 13,3 millions, soit 0,37% de la somme demandée, via un compte administré par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Des « résultats économiques » que Rafael Correa n’estime pas à la hauteur des attentes de son pays.

« Avec une profonde tristesse, mais aussi avec une absolue responsabilité envers notre peuple et envers l’histoire, j’ai été obligé de prendre une des décisions les plus difficiles de tout mon gouvernement« , a ainsi annoncé la semaine dernière le chef du gouvernement équatorien.

L’ensemble des donateurs, des entreprises privées mais aussi des pays comme la France, la Belgique, le Chili, l’Italie, l’Espagne et l’Indonésie, vont ainsi récupérer leur argent. Et perdre un des derniers sanctuaires sauvages de notre belle planète…