épargne, immobilier, France
Politique

Un changement notable de comportement des Français vis-à-vis de l’épargne a été mis en lumière par une étude du cabinet Xerfi. Les produits de placement traditionnels n’attirent plus les foules mais la consommation via l’immobilier reprend des couleurs. 

La crise économique de 2008 a beau être derrière nous, ses traces voire ses stigmates sur les Français sont encore bien visibles. La part des ménages de France estimant qu’il est pertinent d’épargner est sur une courbe descendante depuis une dizaine années. Un record depuis les années 90. A l’inverse, l’opportunité de réaliser des achats importants sur de longues périodes – tels que l’immobilier -, concerne un nombre important de Français. En somme, les Français sont majoritairement tournés vers une hausse de leur niveau de consommation plutôt que vers une hausse de leur volonté d’épargne.

En se penchant sur les chiffres, cette tendance est clairement identifiée : depuis 2009, le revenu brut disponible des Français – soit les ressources financières disponibles nette d’impôts pour épargner et consommer – a progressé de 12%. La consommation a également augmenté, à +14% tandis que l’épargne a reculé de 2,1%.

Ce recul de l’épargne est à rapprocher de deux chiffres forts : l’épargne financière a dégringolé (-27,2%) et les investissements en matière de logement ont explosé à +17%. Les Français ont tranché : ils favorisent l’investissement dans le logement plutôt que l’épargne financière.

Pourquoi un tel recul de l’épargne ?

Plusieurs éléments expliquent pourquoi les Français épargnent moins et consomment plus.

Le premier est sans nul doute les taux particulièrement faibles des produits d’épargne classiques : PEL, Livret, CSL, LDD… ne rapportent plus grand chose : 0,25%, 0,75% voire 1% au mieux. Les contrats assurance-vie atteignent péniblement la barre des 2% nets. Rien de bien attractifs donc. Une faiblesse des taux rémunérateurs voulues et mises en place par l’UE et l’Etat français dans le but d’inciter les ménages à consommer. Pari réussi donc.

Car le deuxième facteur qui explique l’appétit retrouvé pour la consommation est le contrecoup de la diète que les Français s’étaient imposés durant les années de crise. Prudence est mère de sûreté. Les Français thésaurisaient et patientaient. Les craintes quant à leur avenir professionnel s’étant principalement effacées, les ménages ont retrouvé avec joie les chemins de la consommation. Et comme l’attachement à la pierre est très fort, l’immobilier a constitué un secteur de dépenses tout trouvé. D’autant que pour les aider à franchir le pas, la BCE a fait chuter les taux d’intérêts des crédits immobiliers, actuellement encore très bas, à 1,40% en moyenne contre plus de 4% il y a cinq années seulement.

S’il fallait une preuve supplémentaire de l’attachement des Français pour la pierre, une étude de la société de gestion d’actifs Legg Mason avance que près de 25% des Français estiment qu’investir dans l’immobilier constitue le meilleur choix d’investissement qu’ils ont fait au cours des dix dernières années. Les Français sont d’ailleurs les champions en la matière en Europe. Résultat : l’immobilier, valeur refuge par excellence, représente près de 29% de l’actif brut des ménages.

Les Français épargnent donc de moins en moins et consomment plus. Mais c’est bien encore et toujours l’immobilier qui concentrent le maximum de leur capacité de placement. Une investissement jugé sûr et porteur sur le long terme.

Coup de coeurEconomiePolitique

D’après le nouveau livre de l’économiste Jean-Hervé Lorenzi, coécrit avec Mickaël Berrebi, toutes les conditions sont réunies dans le monde actuel pour favoriser la résurgence des guerres dont les principales motivations seraient le manque d’argent. Une vision sombre et pessimiste de notre avenir mais somme toute assez convaincante. 

En effet, dans leur ouvrage intitulé « Un monde de violence », Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes et Mickaël Berrebi affirment que les sources de conflits sont aujourd’hui très nombreux et que la faiblesse des gouvernements trop occupés sur leur prochaine échéance électorale n’arrange rien à l’affaire.

Plus précisément, le livre fait état  de six sources de conflits possibles appelées « contraintes ». Ces économistes distinguent la panne de croissance, le vieillissement, les inégalités, la désindustrialisation, la finance et l’épargne. Ils en listent ensuite les effets et les causes, et présentent les différentes explications possibles.

Mais  le véritable propos du livre porte avant tout sur les immenses besoins d’investir dans l’innovation, dans les infrastructures, dans les besoins de l’économie à long terme pour retrouver des potentialités de croissance alors que dans les pays développés, ces investissements se sont arrêtés. En effet, les pays riches n’y ont plus consacré que 20% de leur PIB, en 2013, contre 23% en 1990, différence qui peut paraît mineure mais qui est gigantesque pour les économistes. Les pays en développement ont fait le chemin inverse: ils sont passés de 23% à 33%. Les pays riches devront «choisir l’avenir», c’est-à-dire investir s’ils veulent retrouver de la croissance. Or l’argent, l’épargne va manquer.

Nécessaire pour l’instauration des systèmes de protection sociale dans les pays en développement comme la Chine, l’Afrique du Sud ou le Brésil, l’épargne va donc basculer vers le social et manquer cruellement à l’investissement. Une évoilution qui ménera logiquement selon les auteurs à une guerre de l’argent, puis à plus long terme, à une guerre bien réelle.

Retrouvez « Un monde de violence : l’économie mondiale 2015-2030 » aux éditions Eyrolles.

Crédits photo : Matze Ott