CJUE
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Mercredi 16 février, la Cour de justice de l’UE (CJUE) a rejeté les recours de la Pologne et de la Hongrie contre une décision de l’UE conditionnant le versement de fonds européens au respect des principes des droits de l’homme et de l’Etat de droit. 

« Chantage et abus de pouvoir »

La ministre de la Justice hongroise, Judit Varga, a aussitôt dénoncé un « abus de pouvoir » de la part de Bruxelles, estimant que « ce jugement est un nouveau moyen de pression sur » la Hongrie. « L’élite bureaucratique (de Bruxelles) ne veut pas accepter le choix libre et l’opinion des Hongrois ! », s’est ensuite indignée la ministre. 

De son côté, la Pologne a qualifié la décision de la cour d’« attaque contre sa souveraineté »« La Pologne doit défendre sa démocratie contre le chantage qui vise à nous priver de notre droit à l’autodétermination », a déclaré le vice-ministre de la Justice, Sebastian Kalet, tandis que le Premier ministre, Mateusz Morawiecki, a dénoncé un « élargissement des compétences » de l’UE « très dérangeant et dangereux ».

Protéger les valeurs de l’UE

« Ce mécanisme a été adopté sur une base juridique adéquate »  et « respecte les limites des compétences attribuées à l’Union ainsi que le principe de sécurité juridique », s’est défendue la cour dans un communiqué.

Un avis partagé par la chef de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, qui estime que la CJUE a « protégé et renforcé » la « communauté de valeurs » au sein de l’UE. Même son de cloche à Paris, où le secrétaire d’Etat aux affaires européennes, Clément Beaune, a salué une « bonne nouvelle ». « C’est un outil supplémentaire dans la boîte à outils de l’Etat de droit », s’est-il félicité. 

« Le Parlement européen attend désormais de la Commission qu’elle applique rapidement le mécanisme de conditionnalité, a prévenu la présidente du parlement européen, Roberta Metsola. Les valeurs comptent, et les citoyens ont le droit de savoir comment les fonds communs sont utilisés  ».

Biélorussie, Pologne, frontière
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Alors que les migrants sont de plus en plus nombreux à se masser à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, certains agissements de l’armée biélorusses inquiètent, et caractérisent même, pour certains, une menace pour la paix.

10 000 soldats polonais déployés

Pour contrer cette «  attaque hybride contre l’UE  » orchestrée par Alexandre Loukachenko, qui est parvenu à masser près de 4 000 migrants à la frontière polonaise en quelques semaines, Varsovie a décidé de répondre par la force, en envoyant 10 000 policiers et militaires pour endiguer ce flux.

Toutefois, en plus de leur faciliter l’accès à la frontière, les autorités polonaises affirment que les forces de l’ordre biélorusses aideraient les migrants, en leur fournissant des outils et en «distrayant»  les soldats polonais présents à la frontière. 

Lasers et pinces coupantes

Les autorités polonaises ont notamment dévoilé des images de réfugiés équipés de pinces coupantes. Or, « un réfugié qui utilise une pince coupante sur un barbelé ne l’a pas ramenée d’Irak. Elle lui a été probablement donnée par les forces de l’ordre », relève Yauheni Kryzhanouski, enseignant-chercheur à l’Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales).

Varsovie affirme également que ses hommes auraient été éblouis par les soldats biélorusses équipés de lasers. Or ces lasers « sont des armes très performantes qui font partie des techniques militaires existantes mais, manifestement, elles peuvent servir en temps de paix », souligne le chercheur.

Toutefois, toutes ces informations sont à prendre avec prudence. « Nous n’avons pas la possibilité de vérifier chaque accusation sur le terrain, nous sommes obligés de nous baser sur les images prises par les forces armées de chaque partie », rappelle monsieur Kryzhanouski.

IVG, Pologne
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Jeudi 22 octobre, le tribunal constitutionnel polonais a voté, à treize voix contre deux, un durcissement du droit à l’avortement, en invalidant un article autorisant l’IVG en cas de malformation grave du fœtus. Depuis, des dizaines de milliers de Polonais et Polonaises déferlent chaque jour dans les rues du pays, pour dénoncer cette injustice.

Liesse des « anti-choix  »

La mouvance extrémiste et conservatrice des «  anti-choix  », qui se qualifient eux-mêmes de «  pro-vie  », a été très satisfaite de ce verdict. Cette décision permettra « de cesser de tuer des êtres vivants » se félicitait par exemple Kaja Godek, de l’initiative citoyenne « Stop l’IVG », à la sortie du tribunal. Mais pour cette militante proche de l’extrême droite, le gouvernement devrait aller encore plus loin. « Il y a encore deux cas dans lesquels on peut tuer des enfants en Pologne. Nous arrêterons notre combat quand ils seront protégés », prévient-elle.

A ses côtés, un autre anti-choix, Michal Kowalik, tient grosso modo le même discours. « La Constitution établit clairement que l’on doit protéger le droit à la vie, rappelle ce membre du parti d’extrême droite Konfederacja. Si ce n’était que moi, l’avortement serait interdit tout court sauf en cas de danger pour la femme ».

Les « pro-choix » enragent 

« Nous sommes juste des incubateurs pour le gouvernement du PiS (Droit et justice), fulminait la militante pro-IVG Zuzanna Naprus, samedi, devant le tribunal. Le droit des femmes est violé en permanence : on rend illégal l’avortement des fœtus gravement abîmés. Et le traumatisme engendré par une telle naissance, qui s’en préoccupe ? »

« Ce changement est plus symbolique que réel » mais « la Pologne emprunte une direction inverse du reste de l’UE, même l’Irlande a pris une trajectoire plus conciliante », s’inquiète la militante pro-choix Justyna Samolinska. « Ce qui est terrifiant, c’est que l’Église catholique, très influente en Pologne, y est pour beaucoup alors que l’écrasante majorité de la population ne soutient pas ce changement », souligne-t-elle.