Royaume-Uni, réfugiés, Rwanda
International

Mardi 14 juin, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a décidé d’interdire en urgence le décollage d’un avion affrété pour expulser 130 migrants du Royaume-Uni vers le Rwanda. Ce projet d’expulsion, publiquement dénoncé par plusieurs personnalités britanniques, reste toutefois une priorité pour le gouvernement, qui compte bien le mener à terme. 

« Politique immorale »

Plusieurs associations ou organisations de soutiens aux réfugiés se sont immédiatement félicitées de la décision de la CEDH. « Dernier billet annulé. PERSONNE NE PART AU RWANDA », a tweeté l’association d’aide de soutien aux réfugiés Care4Calais. « Immense soulagement », abonde Refugee Council.

« Cette politique immorale couvre le Royaume-Uni de honte », ont de leur côté déclaré l’archevêque de Canterbury Justin Welby, celui de York Stephen Cottrell et 23 autres évêques dans une lettre publiée mardi. « Les personnes immorales dans ce cas-ci sont les trafiquants », leur a immédiatement rétorqué a répliqué la ministre des Affaires étrangères Liz Truss.

« On ne nous découragera pas »

Toutefois, l’annulation de ce vol n’est que temporaire. « Maintenant, nous devons nous préparer à résister à l’assaut total des conservateurs sur la CEDH qui est sûrement à venir », prévient la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon.

En effet, le gouvernement britannique ne compte pas abandonner si aisément. « J’ai toujours dit que cette politique ne serait pas facile à appliquer et je suis déçue que les contestations judiciaires et les réclamations de dernière minute aient empêché le vol d’aujourd’hui de décoller », déclarait Liz Truss mardi soir. Mais « on ne nous découragera pas de faire ce qu’il faut et de mettre en œuvre nos plans pour contrôler les frontières de notre pays ».

migrants, Rwanda, UK
InternationalSociété

Boris Johnson pense avoir trouvé la solution pour se débarrasser des migrants traversant la Manche illégalement. Les envoyer dans un pays membre du Commonwealth situé a des milliers de kilomètres du Royaume-Uni, le Rwanda. 

« Calais-Kigali »

Les migrants agglutinés sur la côte française pensaient sûrement que seule la Manche les séparait encore du Royaume-Uni, mais c’était sans compter avec Boris Johnson. Le Premier ministre britannique a en effet plus d’un tour dans son sac pour substituer l’Angleterre à son devoir d’accueil. 

« À partir d’aujourd’hui, toute personne entrant illégalement au Royaume-Uni ainsi que ceux qui sont arrivés illégalement depuis le 1er janvier pourront désormais être relocalisés au Rwanda, explique Boris Johnson. Ce pays est l’un des « plus sûrs au monde, mondialement reconnu pour son bilan d’accueil et d’intégration des migrants », et il pourra accueillir « des dizaines de milliers de personnes dans les années à venir ».

« S’installer de manière permanente »

Jeudi 14 avril, la ministre britannique de l’Intérieur Priti Patel a déclaré qu’un accord avait été conclu entre le Royaume-Uni et le Rwanda. Contre un premier versement de 120 millions de livres sterling, Kigali s’engage à « accueillir les demandeurs d’asile et les migrants », et à « les intégrer aux différentes communautés à travers le pays ».

« Il s’agit de s’assurer que les gens soient protégés, respectés et qu’ils puissent réaliser leurs propres ambitions et s’installer de manière permanente au Rwanda s’ils le souhaitent », a confirmé le ministre rwandais des Affaires étrangères, Vincent Biruta.

« Contraires à la Convention sur les réfugiés »

Le Haut-Commissariat pour les réfugiés a immédiatement fait part de « sa forte opposition » à ce projet. « Les personnes fuyant la guerre, les conflits et les persécutions méritent compassion et empathie, rappelle Gillian Triggs, Haut-Commissaire assistante du HCR. Elles ne devraient pas être échangées comme des marchandises et transférées à l’étranger pour être traitées. De tels arrangements ne font que déplacer les responsabilités en matière d’asile, éludent les obligations internationales et sont contraires à la lettre et à l’esprit de la Convention sur les réfugiés ».

Politique

LDH : Rwanda : 6 avril 1994 – 6 avril 2012

Le 6 avril 1994, l’attentat contre l’avion du président Juvenal Habyarimana a sonné le début d’un génocide soigneusement préparé qui, en trois mois, a provoqué la mort d’au moins huit cent mille Tutsi et de nombreux Hutu dont le Premier ministre, madame Agathe Uwilingiyimana. Dix-huit ans après, alors que des procédures contre des auteurs présumés d’actes de génocide et de crimes de guerre sont engagées, le rôle de la France dans la catastrophe humaine qui a plongé le Rwanda dans la nuit et le sang n’est pas complètement établi. C’est l’effet de la théorie du « double génocide » qui continue à justifier le rôle d’arbitre que s’est donné à la France en « s’étant interposé entre factions rivales », ainsi que l’ordre donné aux forces françaises de l’opération Turquoise de ne pas désarmer les troupes du gouvernement intérimaire rwandais qui commettait le génocide.

Après dix-sept années d’une enquête conçue pour justifier des conclusions définies a priori, le rapport d’expertise balistique portant sur l’attentat du 6 avril, demandé par les juges Poux et Trevidic a confirmé, en janvier dernier, que l’enquête menée de Paris par le juge Bruguière n’avait visé qu’à justifier la politique de la France dans ce pays.

La LDH est attentive à ce que le travail de justice se poursuive pour établir toutes les responsabilités dans des exactions que la Cour pénale internationale a justement qualifiées d’entreprise génocidaire. Elle doit permettre d’abord que les procédures engagées depuis de nombreuses années contre les personnes résidant en France soupçonnées de complicité de génocide aboutissent, mais aussi de poursuivre l’instruction de la plainte menée contre certains membres des forces armées françaises en raison de leur comportement durant l’opération Turquoise.

source article : http://www.ldh-france.org