Politique

Moscou_photo_______________.jpg Si la politique était un sport, cela ferait longtemps que l’Union européenne serait éliminée. Le dossier ukrainien en est la preuve la plus flagrante de ces dernières semaines. Alors que Kiev s’apprêtait à signer un accord d’association avec l’UE, les autorités ont dû renoncer au dernier moment en raison de la politique belliqueuse menée depuis des mois par Moscou. Sans soutien réel d’une Union atone, Kiev a préféré calmer le jeu, quitte à ajourner son rapprochement avec les 28.

Si la politique n’est pas un sport, elle ressemble quand même parfois à un match de boxe. L’Union européenne, faute de préparation vient de prendre un bel uppercut de la part de son adversaire russe. Le Sommet de Vilnius qui se tient les 27 et 28 novembre risque de tourner au fiasco depuis que l’Ukraine a annoncé qu’elle devait prendre plus de temps avant d’entrer pleinement dans la sphère d’influence de l’UE.

Pour le moment, c’est bien l’influence russe qui est la plus forte et rien n’a été fait par l’Europe pour contrer les pressions venues de Moscou. Des pressions pourtant aussi prévisibles que scandaleuses qui n’ont pas été jugées à leur juste mesure par des Européens qui n’ont pas compris tous les enjeux d’un rapprochement entre eux et le pays berceau de la Russie.

Les Européens n’ont pas su défendre leur point de vue alors que la Russie a multiplié les gestes agressifs. Fermeture des frontières aux exportations ukrainiennes, menace sur le prix du gaz, déclarations à l’emporte-pièce de Poutine, tous les moyens ont été mis en œuvre pour rendre la situation insoutenable. Les résultats escomptés sont finalement venus deux jours avant le Sommet de Vilnius. Surprise, l’Union européenne regrette la décision des autorités ukrainiennes, mais n’ose tout de même pas jeter la pierre au président Ianoukovitch. Les Européens savent qu’ils n’ont pas été à la hauteur et essaient de se rattraper aux branches en pointant du doigt la Russie.

La chancelière allemande, Angela Merkel, a déclaré à juste titre que « la guerre froide est finie » et qu’il est inutile de voir les relations internationales à travers le prisme de la confrontation généralisée. Un message destiné à Vladimir Poutine qui est prêt à tout entendre dans la mesure où il a remporté la première manche. Une bataille donc, mais pas la « guerre » (froide) puisque le président et le Premier ministre ukrainiens se sont empressés de rassurer leurs électeurs : l’avenir de l’Ukraine est à l’Ouest malgré le signe peu favorable qui vient d’être donné.

Il faudra que l’Union européenne fasse preuve d’un peu plus de sérieux si elle souhaite se donner les chances de prendre l’Ukraine sous son aile et de profiter des fruits que les deux pourront mutuellement s’apporter sur les plans économique et démocratique.

Politique

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Depuis bientôt 13 années qu’il est à la tête de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine n’a pas cessé de surprendre ses interlocuteurs (généralement de la mauvaise manière) et de multiplier les déclarations fracassantes à l’encontre de ses opposants ou de toute personne qui aurait l’outrecuidance de le critiquer. La Russie a aujourd’hui entrepris un grand travail de réaffirmation à l’international et cela ne fait pas que des heureux.

La désintégration de l’URSS – laquelle a été qualifiée de pire catastrophe géopolitique du XXe siècle par Poutine – a profondément modifié les équilibres au niveau mondial. Amoindrie et amputée d’importants territoires, la Russie a connu un net recul par rapport à « la belle époque » du socialisme triomphant. Après des années 1990 marquées par la chute de tous les indicateurs économiques et sociaux, la Russie a repris du poil de la bête et compte bien profiter d’une énergie retrouvée pour s’imposer sur les théâtres extérieurs.

Les relations avec les États-Unis se sont tellement rafraîchies qu’elles en sont devenues glaciales. Tout est sujet à polémique entre les deux pays et le cas Snowden ne va que cristalliser des tensions déjà bien vives. Si les tensions avec les États-Unis sont vives (notamment en raison du projet américain de bouclier antimissile), elles ne sont qu’à peine meilleures avec le Canada. En effet, les deux plus grands pays du monde s’opposent pour l’appropriation des richesses souterraines de l’Arctique.

Si les relations avec l’Asie et notamment la Chine sont plutôt bonnes, il n’en va pas de même avec beaucoup de capitales européennes. La politique active menée par Poutine pour repousser de l’Est du continent l’influence européenne n’est guère appréciée par les chancelleries et en premier lieu celles qui ont connu le système communiste.

Les ex-républiques soviétiques qui ont désormais rejoint l’Union européenne sont relativement sereines, car hors de portée des griffes de l’ours russe, mais l’inquiétude se porte aujourd’hui sur des pays en dehors de l’Union et donc plus vulnérables aux appels du pied et aux menaces à mots couverts lancées par Moscou. Principal objet de convoitise de Poutine : l’Ukraine.

L’Ukraine est la dernière des grandes ex-Républiques soviétiques à ne pas être retombées sous la coupe de la Russie. La Biélorussie et le Kazakhstan ne sont aujourd’hui plus que des épigones de Moscou et font tout pour se rapprocher de l’ancien phare du communisme. Cela s’est vérifié lors de la création de l’Union douanière entre ses trois pays le 1er janvier 2010. Sous la pression russe, l’Ukraine a finalement rejoint l’Union douanière, mais seulement en tant que membre observateur. Entre l’Union douanière russe et l’Union européenne, l’Ukraine doit choisir et pour ne pas hypothéquer ses chances avec Bruxelles, elle a choisi de ne pas se plier à l’oukase du Kremlin en ne devenant que membre observateur de l’Union douanière.

Moscou et Bruxelles vont donc voir leurs intérêts s’entrechoquer dans les années à venir et il est certain que si l’Union européenne souhaite être un acteur géo(politique) de dimension équivalente à son poids économique, elle devra se montrer ferme vis-à-vis de la Russie, quitte à se retrouver en opposition frontale avec Vladimir Poutine. Le Sommet de Vilnius du Partenariat oriental qui se tiendra les 28 et 29 novembre prochains fera office de signal important.

La Russie poutinienne préfère se positionner du côté de régimes particulièrement meurtriers comme la Syrie qu’elle soutient mordicus depuis plus d’un an. Pour des raisons stratégiques et idéologiques, Poutine défend son allié el-Assad au mépris des vies humaines. Moins dramatique, mais tout aussi étrange, le soutien total au régime vénézuélien a de quoi faire réfléchir une Union européenne qui a appris à bien connaître la personnalité du chef d’État russe.

Seules de grandes puissances pourront freiner l’appétit russe dans les années à venir. Faisons en sorte d’être au moins respecté sur le continent européen afin de ne pas devenir les nouveaux jouets du maître du Kremlin.